jeudi 22 avril 2010

L'inde a toujours soif de charbon

Alors que le problème du réchauffement climatique ainsi que les enjeux d’un développement durable s’imposent à la communauté internationale, la production de charbon reste une valeur sûre pour les pays émergents, comme l’Inde ou la Chine. Confronté à une demande croissante, New Delhi va d’ailleurs devoir en importer massivement cette année.

La production d'électricité a récemment augmenté de façon spectaculaire en Inde. Alors qu'elle est actuellement assurée à 56% par le charbon, seule ressource naturelle présente en grande quantité à l'intérieur du pays, les réserves indiennes ne sont tout simplement plus suffisantes pour couvrir la demande domestique.


Le charbon indien est de qualité médiocre, tandis que beaucoup de mines sont inaccessibles car, par exemple, contrôlées par la guérilla maoïste (Naxalites). Quatrième producteur mondial de charbon en 2008, le pays va donc devoir en importer en grande quantité pour faire face à une demande dévorante qui va sûrement tripler ou quadrupler dans les prochaines années.

Les causes sont simples : dynamiser le développement des nouveaux industriels, qui prolifèrent avidement, et maintenir une croissance d'environ 8% par an. New Delhi souhaite également répondre au besoin urgent de sa population, dont près de la moitié (environ 400 millions de personnes) n'a pas encore accès à l'électricité.

Ainsi, les imports vont sûrement croître de 21% cette année, comme le rapporte Tehelka. New Delhi va en importer 35 millions de tonnes, chiffre qui dépassera les 80 millions en seulement un an. L'Indien Coal India Ltd., plus grosse société minière de charbon au monde, National Thermal Power Corporation (NTPC), plus gros producteur énergétique du pays, ainsi que d'autres entreprises privées et publiques vont faire venir le charbon des Etats-Unis, d'Afrique du Sud, d'Indonésie et d'Australie.


Chandra Bhushan, directeur adjoint du Centre pour la Science et l'Environnement (CSE) à New Delhi, souligne que c'est un "réel problème environnemental". Car le charbon est l'énergie la plus néfaste pour l'environnement, qui génère énormément de gaz à effet de serre (GES) lors de sa combustion. Il émet 1,3 fois plus de CO2 que le pétrole, et 1,7 fois plus que le gaz (source Panorama 2010, Innovation Energie Environnement).

Cependant, M. Bhushan affirme que remplacer cette ressource précieuse par toute autre chose n'est pour l'instant pas envisageable pour l'Inde.
Alors que le nucléaire ne répond qu'à 3% des demandes domestiques en énergie, et fait peur à une population qui lui est hostile, l' "excellente option" des énergies renouvelables (éolien, solaire, géothermie) coûterait en effet beaucoup trop cher selon M. Bhushan. "Plus de 90% de la population indienne ne peut pas se payer ce luxe. Nous sommes au cœur d'un problème purement économique, et c'est pourquoi le charbon restera, de toute façon, la référence indienne", explique-t-il.

Une source, qui n'a pas souhaité être citée, nous affirme que l'Inde a aujourd'hui tous les atouts pour avancer d'un grand pas dans le domaine des énergies renouvelables. L'enjeu est cependant de les rendre abordables, un "long processus qui prendra du temps". Car l'Inde n'a pas autant d'argent que les pays développés, mais ces derniers seraient prêts à lui venir en aide pour les rendre abordables, et s'assurer qu'elles forment une alternative concrète, plus rapidement.


M. Bhushan reste néanmoins pragmatique. "Il ne faut pas s'attendre d'ici à 2012 que le pays fonctionne énergétiquement parlant grâce aux énergies renouvelables". Pour lui, les pays occidentaux doivent d'abord baisser les prix sur ce marché. "Il ne faut pas attendre de l'Inde ou de la Chine qu'elles le fassent, c'est purement impossible, irréalisable".

Publié sur Aujourd'hui l'Inde (http://www.aujourdhuilinde.com/)